14/3/2017-14/5/2017
En Extrême-Orient les
relations entre calligraphie et peinture, associées en Chine à la poésie dès
l’époque des Tang (618-906), ont été progressivement théorisées, à partir des
dynasties Song (960-1279) et des Yuan (1279-1368).
Ces échanges entre deux formes
d’art du pinceau dérivant d’une même source ont donné lieu à de nombreuses
interprétations personnelles aussi bien en Chine qu’en Corée ou au Japon. Ce
parcours met en avant les travaux de Chu Teh-chun, Li Jin, Wei Ligang et Kim
Tsang-Yeul. L’interaction entre le signe
écrit et l’image peinte fait aujourd’hui l’objet d’une formulation nouvelle,
caractéristique du champ moderne et contemporain.
Les poèmes anciens tracés
par Chu Teh-chun s’inscrivent dans le temps long, celui d'une double tradition,
littéraire et calligraphique, qui remonte à l’époque des Song. Ils sont placés
en vis-à-vis de compositions abstraites qui rappellent l’itinéraire de
l’artiste, sa venue en France dans les années 1950, et le déploiement de son
œuvre abstraite. Ce rapprochement suggère qu’il existe une forme de
correspondance entre calligraphie et abstraction, rapports qui irriguent en
profondeur son œuvre peint, mais conditionnent aussi son approche de l’espace
calligraphique.
Li Jin et Wei Ligang
mettent en question de manière singulière la lisibilité de l’écriture. Pour Li
Jin, le texte, tapissant, envahit la composition. La superposition de
caractères tracés à l’encre claire, puis de caractères foncés, trouble le
regard et retarde la compréhension. Sous le discours conceptuel, en surface,
l’œil découvre le caractère fo 佛 (le bouddha), dont
la graphie répétitive évoque une litanie et renvoie à ses séjours de jeunesse
au Tibet. Séjours au cours desquels il fut profondément marqué par le rituel
des funérailles célestes. Chez Wei Ligang, c’est le trait même qui se divise et
se ramifie, comme une rivière qui aurait quitté son lit. La calligraphie, en
tant que corpus de règles, est considérée à rebours, manifestant la liberté de
l’artiste. La transformation du signe qui résulte de cette approche entraîne
une dérive vers l’abstraction, latente dans certaines œuvres, achevée dans
d’autres.
Les œuvres de Kim
Tsang-yeul mettent en œuvre une relation au signe particulièrement complexe.
Les caractères dépeints sur le fond de la toile présentent une vision
fragmentaire du Qianziwen, l’Essai en mille caractères, un texte composé au
VIème siècle à partir d’extraits des classiques confucéens. Pendant des
siècles, l’Essai en mille caractères a joué un rôle fondamental du point de vue
de l’éducation, permettant aussi bien de mémoriser les principes fondamentaux
de la pensée chinoise, que de s’approprier les modèles calligraphiques issus de
Wang Xizhi. En Corée, l’imprimerie a joué un rôle important dans le rôle de la
diffusion de l’Essai. L’œuvre de Kim Tsang-yeul, qui évoque des caractères
d’imprimerie plutôt que des signes calligraphiés se réfère de manière
paradoxale à cette tradition textuelle qui est revisitée dans une mise en scène
illusionniste.
http://www.cernuschi.paris.fr/fr/expositions/autour-du-signe
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