lunes, 24 de julio de 2017

BERNARD PIERRE WOLFF PHOTOGRAPHIES 1971-1984

Bernard Pierre Wolff possédait l’art singulier d’un photographe qui, sans mise en scène, réussit à mettre en harmonie désir et réalité et à créer dans la syntaxe du photojournalisme classique, un monde à la fois terriblement intime et parfaitement universel. La Maison Européenne de la Photographie lui consacre une exposition qui revient sur plus d’une décennie d’images révélant tant son quotidien new-yorkais que ses voyages en Inde ou au Japon.
Bernard Pierre Wolff est mort le 28 janvier 1985, à l’âge de cinquante-quatre ans. C’est à New York, où il vivait depuis plus de vingt ans, qu’il acquit sa notoriété. En France, deux expositions durant le Mois de la Photo et deux livres, En Inde et New York Macadam, publiés aux éditions du Chêne, suffirent à faire de lui une figure de proue de la jeune création contemporaine. L’ensemble de son œuvre appartient aujourd’hui à la Maison Européenne de la Photographie.
Bernard Pierre Wolff, qu’une mort brutale a mythifié, n’a laissé sur sa vie et son œuvre que peu d’informations et de commentaires. À première vue, son travail s’inscrit dans la tradition du grand photojournalisme d’après-guerre. Comme Henri Cartier-Bresson, Bernard Pierre Wolff a toujours considéré que le talent du photographe consistait, face à l’incohérence du réel, à révéler et à imposer un ordre latent. Comme lui, il a parcouru le monde à la recherche de l’image universelle capable de rendre compte instantanément d’une situation ou d’un événement. On ne doit point s’étonner, dès lors, de trouver dans chacune de ses images (dont aucune n’est recadrée) le souci de la composition et de la perfection formelle. La plupart d’entre elles pourraient illustrer le fameux concept bressonien de l’« instant décisif », où la tête, l’œil et le cœur du photographe sont sur une même ligne de mire. En ce sens, Bernard Pierre Wolff est un classique… mais un classique qui a retenu les leçons d’un Robert Frank et, surtout, d’un Charles Harbutt, pour lesquels «tout désormais peut être photographié» : le laid, le banal, l’insignifiant…


Dans cette perspective, les rues de New York, avec leur cortège de figures inouïes, leur faune incongrue et souvent incroyable, allaient devenir un champ d’observation privilégié. À partir de 1974 et pendant plus de quatre ans, Bernard Pierre Wolff arpenta la ville en tous sens, photographiant tout ce qui pouvait l’être : les dingues, les drogués, les travestis, mais aussi les scènes de vie les plus anodines. Il composait des images quotidiennement, avec ivresse et volupté, transformant peu à peu son art en une pratique hallucinatoire.
Toute son œuvre, que ce soit son magnifique reportage sur l’Inde ou, plus tard, le travail qu’il fit sur le Japon, témoigne de cette subjectivité forcenée qui, chez lui, bouscule tout et menace, à l’intérieur du cadre, jusqu’à l’équilibre trop parfait des formes et des lignes. En effet, le principe constitutif des photographies de Bernard Pierre Wolff s’articule autour des fulgurances du désir. Un désir obsessionnel et à chaque fois décisif, qui déclenche le processus créatif et fait que chaque image porte en elle, comme irradiant, cette empreinte indélébile — sorte de trou noir — par laquelle tout s’ordonne.
Ici, la sensuelle cambrure d’une hanche, là, un sourire complice, plus loin encore, à moitié caché et presque hors du cadre, le torse nu d’un homme au travail… le désir en acte rejoint le réel pour le façonner et lui donner sens.

https://www.parisbouge.com/event/184316

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