Entre la Russie et le
Verbier Festival, c’est une longue histoire d’amour. Pour l’anecdote,
saviez-vous que Martin T:son Engstroem, le Directeur du Verbier Festival, avait
obtenu un diplôme universitaire de russe lors de ses jeunes années ? Un
tropisme slave présent dès la création du Festival, en 1994, avec la présence
d'Evgeny Kissin, Maxim Vengerov, bientôt suivis de Mischa Maisky, Yuri Bashmet
ou Natalia Gutman, et qui culmina pour Martin en 2015 avec l’attribution du
prestigieux Prix Chostakovitch, faisant du Fondateur du Festival le premier
lauréat non musicien de son histoire. Certes, il faut se méfier des
généralisations et des idées préconçues, mais l’école russe en musique brille
par son parfum si authentique et ses génies de la composition comme de
l’interprétation. Mais qu’est-ce qui rend un musicien russe si unique ? Pas le
poids d’une histoire encombrante, puisque la musique russe est relativement
jeune, le Conservatoire de Saint-Pétersbourg ayant été créé par Anton
Rubinstein en 1862. Pas non plus une identité nationale arc-boutée sur ses
positions, vu que le génie de l’école russe a été précisément de s’ouvrir aux
influences extérieures.Il n’y a qu’à énumé- rer les ascendances françaises, polonaises et allemandes de Rubinstein pour comprendre l’esprit qui présida au Conservatoire de Saint-Pétersbourg où enseigna également le grand Leopold Auer qui eut pour élèves des musiciens aussi mythiques que Jascha Heifetz, Nathan Milstein et indirectement David Oistrakh. Ainsi va la musique russe, à la fois terreau d’influences et férocement nationale. Les migrations liées à la Révolution de 1917, à la Seconde Guerre mondiale, puis à la chute du Mur de Berlin propageront en outre l’école russe dans le monde entier, avec un succès toujours renouvelé. On s’en convaincra aisé- ment avec le parcours d’un des chouchous absolus du Festival, Daniil Trifonov, qui joue ce soir à la Salle des Combins. Après des études à l’Académie Gnessine de Moscou, le jeune prodige se forma à Cleveland où enseigne désormais Sergeï Babayan (qui se produira à Verbier le 30 juillet), pianiste formé à l’école soviétique. Impossible de citer tous les grands moments que nous ont offerts les musiciens russes à Verbier.
Nombre d’entre vous se souviennent sans doute encore de l’extraordinaire Boléro dirigé par Valery Gergiev en hommage à Maïa Plissetskaïa l’an dernier. C’est que les musiciens russes brûlent d’un feu intérieur toujours crépitant. Un pianiste comme Grigory Sokolov (en concert le 26 juillet) allie un poignet de fer à une générosité sonore qui fait de chacun de ses concerts une expérience inoubliable. Car un musicien russe ne se contente pas seulement d’interpréter le texte musical, il vous empoigne, vous effraie, vous bouleverse ! Bien sûr, leur technique, parfois atypique – avec un jeu moins près de l’archet que d’autres écoles banniraient vigoureusement –, est la garantie d’une liberté absolue par rapport au texte musical. La posture, le corps, le geste, tout n’est là qu’au service de l’émotion et de la plénitude sonore, offrant des interprétations exceptionnelles, frémissantes d’humanité. Cette année encore, la délégation russe amène un fort contingent. Dans l’Academy, le légendaire Zakhar Bron donnera une master class très attendue. Quant aux concerts, outre les musiciens déjà cités, on se précipitera aux récitals du pianiste Lukas Geniušas et du violoniste ukrainien formé à Moscou, Roman Simović. Et la relève est déjà assurée, puisque la Fondation Neva renforce cette année son soutien, devenant Sponsor Principal du Festival au même titre que Nespresso et Julius Baer. Elle offre, à l’issue de l’Academy, un prix important destiné à récompenser le musicien russophone le plus prometteur.
Spasibo à tous !
Laurent
Vilarem
Verbier Festival. Gergiev.
Matsuev.Trifonov



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