Ses défenseurs ont obtenu gain de cause. L’artiste franco-américaine, figure éminente de la Résistance et de la lutte antiraciste, sera bel et bien panthéonisée à l’automne.
L'artiste Joséphine
Baker à Buenos Aires, en Argentine dans les années 50. (-/AFP)
par LIBERATION et AF
«C’est oui !» a dit le chef de l’Etat le
mercredi 21 juillet à l’Elysée. Joséphine Baker entrera bien au Panthéon, comme le demandaient
depuis près de dix ans de nombreuses personnalités. Le Parisien a dévoilé la nouvelle ce dimanche, relatant la décision du chef
de l’Etat prise à l’issue d’un entretien le 21 juillet avec un groupe de
personnalités venu plaider pour cette initiative. Comprenant notamment le
romancier Pascal Bruckner, le chanteur Laurent Voulzy, l’entrepreneuse Jennifer
Guesdon, l’essayiste Laurent Kupferman et surtout Brian Bouillon-Baker,
septième des douze enfants de Joséphine Baker. La cérémonie aura lieu le 30
novembre, selon le quotidien, faisant de la célèbre meneuse de revue, née en
1906 dans le Missouri et enterrée en 1975 à Monaco, la première femme noire à
reposer dans la nécropole laïque. Une date symbolique, qui correspond à celle
de son mariage avec Jean Lion qui lui a permis d’obtenir la nationalité
française.
Le dossier en faveur de l’interprète de la célèbre chanson J’ai
deux amours avait déjà été examiné une première fois fin juin par l’Elysée,
selon le Parisien. Une pétition en faveur de la panthéonisation de l’artiste,
lancée il y a deux ans par Laurent Kupferman, à la suite de celle initiée par
le philosophe Régis Debray en 2013, avait également rassemblé près de 38 000
signatures. «Artiste, première star internationale noire, muse des cubistes,
résistante pendant la Seconde Guerre mondiale dans l’Armée française, active
aux côtés de Martin Luther King pour les droits civiques aux Etats-Unis
d’Amérique et en France aux côtés de la Lica [Ligue internationale contre
l’antisémitisme, devenue Licra: Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme,
ndlr] […], nous pensons que Joséphine Baker, 1906-1975, a sa place au
Panthéon», faisait valoir le texte de Laurent Kupferman.
Plus récemment, le 7 juillet, l’élu socialiste parisien Boris Jamet-Fournier avait remis une pièce dans la machine, présentant un vœu au conseil de Paris pour réclamer l’entrée au Panthéon de celle que Picasso appelait la «Néfertiti des temps présents». Vœu qui avait été adopté à la majorité. «Célébrer la flamme artistique, les combats justes et le courage incroyable de Joséphine Baker est une bonne décision, à laquelle je suis heureux que Paris ait poussé. Cela contribue aussi à davantage de diversité au Panthéon, pour qu’il soit le reflet de notre société et de notre histoire», s’est réjoui ce dimanche auprès de Libération l’élu socialiste.
«Un beau symbole»
Le Panthéon, qui domine la montagne Sainte-Geneviève, (l’une des
buttes de Paris, dans le Ve arrondissement), est depuis plus d’un siècle la
nécropole laïque des «grands hommes» français, dont la «patrie reconnaissante»
veut honorer la mémoire. Parmi les 80 «panthéonisés» figurent des politiques,
des écrivains, des scientifiques, quelques religieux et beaucoup de militaires.
Seules cinq femmes y sont actuellement inhumées, dont Simone Veil, la dernière
personnalité à l’avoir été, en 2018. Interrogé sur ce manque d’équité en lors
d’un entretien vidéo pour le magazine Elle, publié le 1er juillet, le président
de la République avait assuré n’avoir pourtant «aucun tabou pour faire entrer
les femmes au Panthéon». Ce dernier qualifiait alors Joséphine Baker comme
étant «impressionnante de modernité et assez inspirante», «synthétique de ce
qu’est d’être française, elle qui était américaine».
«C’est un beau symbole, un bel hommage rendu aux gens qui vivent
dans la difficulté, qui souffrent du mépris et de l’abandon à cause de leur
naissance ou de leur couleur de peau. Elle n’était ni un grand écrivain, ni un grand
scientifique, mais c’était une personnalité courageuse qui a risqué sa vie pour
sa patrie de cœur. Et quand on voit d’où elle vient, une enfance pauvre dans
une Amérique très ségrégationniste, et le chemin qu’elle a parcouru ensuite,
cela prouve que tout est possible», a déclaré au Parisien le chanteur Laurent
Voulzy. Cela «symbolise l’image d’une France qui n’est pas raciste,
contrairement à ce que disent un certain nombre de groupuscules médiatiques,
Joséphine Baker est une vraie antiraciste, une vraie antifasciste», a réagi de
son côté Pascal Bruckner auprès de l’AFP. La ministre de la Culture, Roselyne
Bachelot, a quant à elle écrit qu’il s’agissait d’un «modèle de femme vaillante
et généreuse», et que «nous lui devons cet honneur».
https://www.liberation.fr/culture/josephine-baker-entrera-au-pantheon-le-30-novembre-20210822_2UPFLV4YZNDSFDWY65BGDRHWRM/
No hay comentarios:
Publicar un comentario