lunes, 20 de abril de 2020

. EXPOSITION "RÉCONCILIATIONS. HENRI IV ET ROME, 1589-1610". AU CHÂTEAU DE PAU, AVEC LE SOUVENIR D'HENRI IV


Marguerite de Navarre lui donne son grand air Renaissance.Et son petit-fils, Henri IV, sa valeur de symbole. Berceau du plus populaire de nos monarques, le château de Pau est indissociable de son image. Y séjourner, le restaurer revient pour ses successeurs à asseoir sa légitimité, à se parer de l’aura du roi au panache blanc.

Sa silhouette de pierre blonde veille sur le Béarn depuis des siècles. Des fenêtres à meneaux donnant sur les Pyrénées , la"plus belle vue du monde" comme l’écrivit, en 1838, un touriste nommé Stendhal.

Marguerite d'Angoulême, sœur de François Ier, laisse son empreinte sur le château
"Henri d’Albret fait édifier la façade que nous connaissons pour Marguerite", raconte François Bayrou, maire de Pau. "Il rentre d’Italie où il a guerroyé avec François Ier. Il a vu la Renaissance italienne, il fait venir des architectes. Le roi de Navarre, souverain de Béarn est, comme disait son grand-père, un pou entre deux singes, l’Espagne et la France; il dirige un petit royaume, amputé de la Navarre espagnole..."



Sœur de François Ier, Marguerite d'Angoulême épouse le roi de Navarre. Sa fille Jeanne donnera naissance au futur Henri IV. © Domaine public

Ainsi Marguerite d'Angoulême a essaimé les lettres, le Béarn et le château où naîtra son petit-fils, le futur Henri IV. Pour autant, son époux et elle n’édifient pas à partir de rien, ils modifient, mettent au goût du jour. L’élément le plus ancien subsistant de l’ancienne forteresse est la tour Mazères, du XIIe siècle. Puis la tour Montauser bâtie au siècle suivant, premier donjon du château primitif.


Vient ensuite le temps de Gaston Phébus, comte de Foix, vicomte de Béarn. Profitant de la guerre de Cent Ans, il est le premier à affirmer l’indépendance de ses possessions et à ne plus faire allégeance ni au roi de France ni à celui d’Angleterre. Pour montrer sa puissance et protéger ses terres, il fait édifier des donjons de brique, comme celui de Pau qui jette une tache de couleur sur les façades de pierre du château. "La capitale de Phébus est Orthez où il aurait tué dans un accès de colère son fils légitime, poursuit Isabelle Pébay-Clottes, conservateur au château. En 1380, il vient se retirer à Pau. C’est ici qu’il aurait écrit Le Livre des oraisons où il demande à Dieu pardon."



Blason aux armes des Foix Béarn, surmonté de la formule "Fébus mé fé", soit "Phébus me fit", château de Pau. © Tony Hisgett

À la fin du XIVe siècle, Gaston IV fait de Pau la capitale de la vicomté de Béarn et dote le château d’éléments d’agrément, comme les toits en ardoise, pour transformer la forteresse en palais. Mais c’est Henri II d’Albret qui, entre 1529 et 1534, réalise les transformations les plus importantes, en l’honneur de sa Marguerite.

"Il confie les travaux au maître d’œuvre Pierre Tournoyer et fait venir des ouvriers d’Anjou, dit Isabelle Pébay-Clottes. De larges baies sont percées au rez-de-chaussée de l’aile sud, jusqu’alors aveugle. Le fond de la cour d’honneur est enrichi d’un décor italianisant. Plus fabuleux que tout, l’escalier d’honneur édifié sur l’emplacement des anciennes cuisines médiévales. Voûté en berceau, il est orné d’un décor sculpté où le H et le M entrelacés reviennent comme une antienne sacrée."

À sa naissance, le petit Henri est couché dans une carapace de tortue
À la génération suivante, Jeanne III d’Albret et Antoine de Bourbon vont créer sur l’immense domaine des jardins réputés les plus beaux d’Europe. Et le 13 décembre 1553, le château de Pau entre définitivement dans l’histoire avec la naissance du futur Henri III de Navarre et IV de France, couché par son grand-père dans une carapace de tortue en guise de berceau. Vénérée à l’égal d’une relique, la carapace légendaire est exposée dans la chambre dite du roi, en réalité reconstituée au XIXe un étage au-dessus de celle où est né "nouste Henric", notre Henri, comme disent les Béarnais.



Avant d'être Henri IV de France, le Vert-Galant est Henri III de Navarre. Portrait vers 1575 conservé au château de Pau. © Domaine public

"Il passe peu de temps au château mais y revient régulièrement jusqu’en 1587. Il s’y rend en 1584 pour négocier avec le duc d’Épernon les conditions de sa reconnaissance comme héritier présomptif du trône de France. En 1602, il fait déménager à Fontainebleau les plus belles tapisseries et trésors d'orfèvrerie de son bon château de Pau." Catherine de Bourbon, la sœur de Henri IV, puis des gouverneurs successifs continueront de veiller sur le domaine qui a vu naître le Béarnais.


Louis XIII revient en 1620 au château de son père. Pour sévir. Pendant de l'édit de Nantes, l'édit de Fontainebleau, qui autorise en ce Béarn protestant et indépendant le culte catholique, est mal appliqué. Le roi vient y mettre bon ordre et, tout en jurant de respecter les fors et coutumes de Béarn, le rattache avec la Navarre à la couronne de France. Les descendants de Henri IV ne séjournent plus à Pau. Seuls y sont reçus quelques souverains étrangers de passage. Jusqu'à la Révolution.



Le donjour de briques, ou tour Gaston-Fébus, se distingue du château Renaissance. © Capbourrut

En 1808, cependant, lorsque Napoléon se rend à Pau, le château est dans un état désastreux après avoir servi de garnison pendant la Terreur. Impossible d'y habiter. Des projets de restauration se font jour sous Louis XVIII et Charles X mais il faut attendre Louis-Philippe pour les voir se préciser.

Louis-Philippe sauve le château... avec quelques arrière-pensées politiques
"Le roi des Français est passionné d'architecture et d'histoire. Il voit aussi que le château de Pau est intimement lié à la figure consensuelle de Henri IV, le premier souverain Bourbon. Le restaurer de fond en comble, y mettre sa patte, peut lui permettre d'asseoir mieux encore sa légitimité aux yeux des Français."


La façade du Midi en 1828. Gravure sur cuivre signé Auguste Lafollye. © Domaine public

C'est le début d'un immense chantier qui va s'étendre de 1838 à 1875. Construction du pont de À partir de 1842, les envois de mobilier, de lustres, de tapisseries se succèdent, achetés sur la cassette de Louis-Philippe ou prélevés sur le Garde-Meuble royal. Une centaine de tapisseries précieuses, du XVIe auXIXe siècle, s'intègrent ainsi dans les pièces du château.

La révolution de 1848 empèchera Louis-Philippe et Marie-Amélie de séjourner à Pau. Bientôt, leurs appartements deviennent impériaux et accueillent Napoléon III et Eugénie. Les travaux se poursuivent sous le second Empire. Après 1870, le château de Pau devient un palais national mis à la disposition des présidents de la République, puis un musée que l'on connaît.


Reconstitution de la chambre de Henri IV. © Getty Images

Mais une dernière fois, en 1868, peu avant la chute de Napoléon III, il aura abrité une descendante directe de Henri IV. Contrainte de s'exiler et bientôtt d'abdiquer, Isabelle II d'Espagne séjourna quelques mois dans la demeure où prit corps la formidable épopée des Bourbons. Et devant cette reine qui aimait autant que lui les plaisirs de la chair, nul doute que le Béarnais eût souri.
Château  Henri IV  Histoire  Marguerite de Navarre  Patrimoine
Par Antoine Michelland

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