Dans Vous n’aurez
pas le dernier mot au Théâtre Montparnasse, Stéphane Bern revient sur les
planches pour son premier seul-en-scène. Une pièce historique au ton décalé où
il devient le porte-voix d’hommes et de femmes célèbres, au moment où ces
illustres tirent leur révérence. Autant de passages vers l’au-delà profonds et
drolatiques, au risque du mot de trop…
Depuis Numéro complémentaire en 2004-2005, vous n’êtes pas remonté
sur scène. Qu’est-ce qui vous a séduit dans cette
nouvelle pièce?
C’était un rêve de remonter sur scène, mais ce n’était pas une
intention. J’avais reçu des dizaines de comédies, et Diane Ducret a su me
toucher par son texte. Sans doute parce que j’aime les mots d’esprit, j’en ai
d’ailleurs fait deux livres! Ces illustres personnages ont laissé des
testaments remplis de grandes idées, mais leurs dernières paroles montrent
toute leur humanité, leur vanité parfois. Il y a une vérité ultime, et souvent
un panache à la française. C’est profond et touchant, généralement très drôle
et jamais mortifère. J’ai, pour ma part, conscience d’être mortel. Cela ne me
fait pas peur de parler de la fin. C’est dans l’ordre des choses, et cela rend
plus humble de le savoir. On est aussi dans l’urgence de profiter de la vie!
"Donne-toi du bon temps", écrit André Gide à François Mauriac au
moment de mourir…
Stéphane Bern reprend la direction des planches au Théâtre
Montparnasse. © Julio Piatti
Les derniers mots sont souvent cocasses!
Oscar Wilde, qui s’éteint dans une chambre d’hôtel miteuse, aurait
dit: "Ou c’est ce papier peint qui disparaît, ou c’est moi!" Maria
Callas s’exclame "Je ne me sens pas bien" et meurt l’instant d’après…
La fin de Coco Chanel est aussi très étonnante! Maquillée, coiffée, habillée,
elle s’allonge sur son lit, une douleur dans la poitrine. Puis elle dit à sa femme de chambre: "C’est comme cela que l’on
meurt", avant d’entrer dans l’autre monde. Du style, jusqu’au dernier
souffle! J’aime aussi beaucoup la répartie de Voltaire: "Je m’arrêterais
de mourir s’il me venait un bon mot ou une bonne idée." Ou encore celle de
Sacha Guitry qui demande à avoir des draps de lin, mais "de lin
seul!" précise-t-il. Quel brillant trait d’esprit!
Est-ce une pièce à rebours d’une époque obsédée de jeunesse?
Nous sommes dans une société de l’immédiateté où l’on veut tout,
tout de suite. Où un tweet de Trump devient un événement.
Prenons le temps, au contraire. "Le vrai chef-d’œuvre, c’est de
durer", résumait Metternich. J’aime les gens qui s’inscrivent dans la
durée, qui creusent leur sillon. Il y a plus d’épaisseur. J’ai désormais trente
ans de carrière, j’ai l’âge que j’ai et je l’assume très bien… Ce qui est
intéressant en vieillissant, c’est de s’entourer de gens qui vous bousculent un
peu. C’est le cas de Jérémie Lippmann, le metteur en scène, qui a collaboré
avec JoeyStarr, M ou Olivia Ruiz. Et j’en suis ravi! J’avais l’impression de
"m’institutionnaliser" avec la Mission Patrimoine, de devenir un
monument. J’ai toujours aimé, en revanche, raconter l’Histoire avec un pas de
côté, la rendre grand public et attractive. Il ne faut pas la "vulgariser" pour autant, mais être
généreux, la faire vivre par des anecdotes, des passions humaines… Le savoir doit être comme une gourmandise que l’on partage
Sa plus belle rencontre? La plus
impressionnante, c’est avec la reine Élisabeth! La première fois, c’était à
Windsor pour prendre le thé au tout début des années 1990. En 1992, je l’ai
rencontrée à Paris pour un entretien sur proposition du président François
Mitterrand. Puis, en plus de la retrouver à des dîners d’État, j’ai eu la
chance d’être décoré par Élisabeth II en personne. Un moment unique ! Elle est
un mythe vivant. De surcroît, j’ai découvert que Sa Majesté a un humour
ravageur, très pince-sans-rire. © Claire Morris Photography
Vous aimez toujours échapper aux cases!
Ne jamais être là où l’on vous attend: c’est une obsession chez
moi. J’éprouve toujours la même tendresse pour les têtes couronnées. Je
conserve mes fondamentaux, mais pourquoi se cantonner? C’est formidable ce que
la vie vous apporte! Et cette variété vous donne, dans le même temps, une
épaisseur. Une famille royale est plus amusée d’avoir affaire à quelqu’un qui a
du répondant et fait mille choses, plutôt qu’à quelqu’un s’exprimant avec un
sujet, un verbe, un "compliment". Je poursuis les Secrets d’Histoire
sur France 3. J'ai aussi présenté, le 26 octobre dernier, une émission sur Les
130 ans de la tour Eiffel, et je commenterai l’Eurovision junior en novembre
2019. J’anime À la bonne heure sur RTL, je fais des master class en région, et
je m’occupe de la Mission Patrimoine dont j’ai publié une sorte de bilan,
mi-septembre, intitulé Sauvons notre patrimoine. À ce jour, nous avons déjà
sauvegardé 140 monuments. Il y en aura 120 de plus l’année prochaine. Je
travaille aussi sur des propositions concrètes pour transmettre, notamment,
l’amour de notre patrimoine aux jeunes. Et en juillet prochain, je tournerai une
nouvelle fiction pour France 3. Cela ressemble à une course perpétuelle, mais
ça correspond à mon rythme. Chaque activité est une récréation de l’autre. Tout cela, en
définitive, c’est encore une affaire de gourmandise!
Vous n’aurez pas le dernier mot, de Diane Ducret, avec Stéphane
Bern, au Théâtre Montparnasse, depuis le 14 octobre 2019. 31, rue de la Gaîté,
75014 Paris.
www.theatremontparnasse.com/
Culture Stéphane Bern Théâtre
Par Marie-Émilie
Fourneaux,
https://www.pointdevue.fr/personnalites/stephane-bern-au-theatre-montparnasse-cetait-un_12440.html?xtor=EPR-1-[]-[20191101]&utm_source=nlpdv&utm_medium=email&utm_campaign=20191101
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