Pauline Rouquette
L'exposition "Revivre", au Muséum national d'histoire
naturelle, propose aux visiteurs de rencontrer des espèces disparues grâce à la
réalité augmentée. Un projet présenté vendredi sur Europe 1 par Bruno David, le
président du Muséum, qui sensibilise et alerte sur les dangers de la
disparition de la biodiversité.
INTERVIEW
À l'occasion de l'exposition "Revivre", qui redonne vie
virtuellement à des espèces disparues, Bruno David, président du Muséum
national d'histoire naturelle et auteur du livre À l'aube de la 6e extinction
(Grasset) était l'invité d'Europe 1, vendredi. Grâce à la technologie et à des
lunettes de réalité augmentée, le Muséum redonne vie à onze espèces disparues.
L'occasion de rêver, mais aussi de prendre conscience du danger qui guette : celui
d'une extinction de masse, dont l'homme pourrait à terme être la principale
victime s'il n'agit pas rapidement pour préserver la planète et sa
biodiversité.
Toutes ces espèces ont disparu du fait de l'homme
Quagga, grand tigre à dents de sabre, dodo... Les animaux présentés
"correspondent beaucoup à des espèces éteintes ou en danger
d'extinction", explique Bruno David. "Il y en a une que j'aime
beaucoup, c'est la tourte voyageuse, une espèce de pigeon. Il y en avait
plusieurs milliards d'individus en Amérique du Nord au 19e siècle et on a
réussi à tous les tuer", poursuit le président du Muséum national
d'histoire naturelle.
Le point commun entre toutes ces espèces ? Elles ont disparu du
fait de l'homme, pointe Bruno David, évoquant la chasse, la surpêche et la
surexploitation des ressources. Des phénomènes très actuels qui font planer la
menace d'une sixième grande extinction, avec la disparition d'espèces communes
d'oiseaux ou d'insectes. "Je m'inquiète beaucoup pour ce qui fait le socle
du fonctionnement des écosystèmes et de la biodiversité sur Terre"
affirme-t-il.
Et si la disparition de certaines espèces correspond à un processus
cyclique, tout comme les flux d'apparition, Bruno David ajoute néanmoins que
"l'on est en train de provoquer des extinctions et des déclins d'espèces à
une vitesse qui est beaucoup plus rapide que leur renouvellement
possible". Ce qui signifie que l'on fait disparaître des espèces en
quelques siècles ou dizaines d'années, alors que l'émergence d'une nouvelle
espèce dans une dynamique évolutive prend environ 10.000 ou 100.000 ans.
"On voit qu'il y a un différentiel de vitesse qui fait qu'on fait éteindre
plus vite qu'on fait apparaître."
"La vie va continuer d'exister sur Terre, que l'homme soit
présent ou non"
Dans À l'aube de la 6e extinction (Grasset), Bruno David alerte sur
une nouvelle grande extinction de masse. S'il y en a déjà eu cinq auparavant,
la sixième s'en distingue car c'est la première fois qu'une espèce - l'humain -
est à l'origine d'une extinction de masse possible qui représente avant tout
une menace pour elle-même. En effet, si la nature s'auto-régule lorsqu'un
prédateur prend trop de place, l'homme pourrait très vite en pâtir. "La
nature fonctionne toujours comme un jeu d'équilibre et d'interactions",
dit-il. "À partir du moment où une espèce domine trop, elle se montre
comme étant la cible potentielle des pathogènes, et c'est un petit peu ce qui
nous arrive en ce moment", poursuit Bruno David, évoquant la pandémie de
Covid-19.
D'ailleurs, celui-ci se dit bien plus inquiet pour l'humanité que
pour la planète. "La vie va continuer d'exister sur Terre, que l'homme
soit présent ou non", dit-il. En dépit des technologies que l'on
développe, de la pharmacopée dont on dispose, "nous sommes une espèce
relativement fragile. On a l'impression d'être très protégé, mais on voit quand
même ce qu'un virus arrive à faire", poursuit-il, estimant que cela
devrait nous amener à réfléchir davantage. "Notre complexité nous rend
fragiles et il faut que l'on fasse attention : on pourrait faire partie des
espèces qui disparaissent lors de la prochaine extinction."
https://www.europe1.fr/societe/revivre-une-exposition-a-la-rencontre-despeces-qui-ont-toutes-disparu-du-fait-de-lhomme-4052791#:~:text=L'exposition%20%22Revivre%22%2C,la%20disparition%20de%20la%20biodiversit%C3%A9.
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