L’illustrateur français a réalisé plus de 110 dessins pour le célèbre magazine américain, avec qui il a collaboré pendant une quarantaine d’années.
Par Valentin
Etancelin
Sempé a signé plus de 110 couvertures du « New Yorker ».
MÉDIAS - Par son trait fragile et délicat, il a capturé « un large éventail des plaisirs simples de la vie ». Ces mots, ce sont ceux, en 2019, de l’écrivaine et directrice artistique du New Yorker Françoise Mouly à l’égard de Jean-Jacques Sempé, célèbre dessinateur français décédé ce jeudi 11 août avec lequel le prestigieux magazine a longtemps collaboré.
Sur Instagram, ce vendredi, la publication a rendu un hommage
symbolique au créateur du Petit Nicolas, rappelant que ce dernier est l’auteur
de plus de 110 des Unes du titre. Beaucoup d’entre elles mettaient en scène la
ville de New York, peut-on lire en légende. « J’aime les couleurs de New York,
disait Sempé. Elles sont vivantes : jaunes, verts, rouges et bleus vifs. Paris,
où je vis, est magnifique, mais il y fait toujours gris. J’aime Paris aussi,
mais ce n’est pas la même chose. »
L’histoire de Sempé et du New Yorker remonte à loin. Comme il l’a
expliqué au Figaro, en 2017, c’est à l’époque où, adolescent, il travaillait
comme courtier en vin. Il livrait notamment des échantillons de vin au Centre
d’information américain. « Là-bas, je pouvais regarder le New Yorker sur papier
glacé. J’étais ébloui. Cela me semblait être un monde
lointain, imaginaire et inaccessible. C’était du rêve », confiait-il.
Alors dessinateur en herbe, il tombe d’amour
pour la finesse des dessins, l’humour des contributeurs, les gags sans bulles
ni paroles. Travailler pour le New Yorker est un rêve. Un rêve qu’il va
réaliser grâce à l’un de ses amis, le dessinateur américain Edward Koren. De passage en 1970,
ce dernier l’a introduit à l’une des journalistes de l’hebdomadaire, Jane
Kramer.
« Elle était venue à Paris à l’occasion d’élections législatives,
se rappelait-il, là aussi dans les colonnes du Figaro. Elle m’avait posé
quelques questions et était repartie avec un ou deux de mes albums. » De retour
à New York, elle les a montrés au directeur. Ni une ni deux, celui-ci lui a
rapidement écrit, lui disant : « Envoyez-moi ce que vous voulez, ce que vous
pouvez. » Sempé dit avoir été « terrifié
». Mais voilà, « je ne pouvais plus reculer ».
Il signe son premier dessin de Une, en 1978. «
C’était le dessin d’un homme sur le rebord de la fenêtre d’un building, qui
hésitait à prendre son envol », racontait-il, devenant ainsi le premier
dessinateur à collaborer avec le titre.
Les dessins mélancoliques de Sempé ont croqué la grosse pomme à
pleines dents.
Le « frenchie » a su imposer son style au New Yorker, même si
l’exigence du journal et de son ancien directeur, William Shawn, l’a parfois
terrorisée. « Il était fou de son journal, il adorait les dessins, il adorait ses
journalistes. D’ailleurs là-bas on ne disait pas
journaliste, on disait écrivain. Et on ne disait pas dessinateur, on disait
artiste », se remémorait-il.
La ville de New York n’a pas seulement marqué d’un sceau son
travail. Elle a bouleversé l’homme qu’il était. Et notamment sa première visite
: « Je me souviens, c’était en plein hiver, un hiver glacial, je n’avais pas de
gants, pas de cache-nez et pourtant j’ai traversé Central Park avec un bonheur
extatique. J’avais presque 50 ans, je m’en serais donné 20. Pour la première
fois de ma vie, j’existais. »
Son œuvre pleine de bonhomie a souvent retranscrit ce sentiment de
petitesse au milieu d’espaces gigantesques.
Une chose est sûre, le coup de crayon poétique de Sempé ne va pas
s’effacer de nos mémoires.
https://www.huffingtonpost.fr/culture/article/sempe-a-marque-l-histoire-du-new-yorker-avec-ces-unes-inoubliables_206501.html?xtor=EPR-5689964-[daily]-20220812
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