Marchand d’art éclairé et ami des plus grands artistes de son temps,
l’histoire du grand-père maternel d’Anne Sinclair est intimement liée aux
bouleversements artistiques du 20e siècle.
C’est une exposition
aux multiples facettes qui ouvre ses portes à La Boverie cet automne. Un jeu de
poupées russes dont le coeur se déplace sans cesse. On y parle du destin d’un
homme et, à travers le filtre de la biographie, apparaissent ses passions, ses
amitiés, ses prises de position face au nazisme puis son exil vers l’Amérique
et la nécessité de reprendre là-bas ce qu’il avait construit à Paris, en
ouvrant une nouvelle galerie. Il en ressort ce par quoi on aurait pu commencer
mais qui se dessine avec d’autant plus de netteté grâce à la mine et au pinceau
des artistes qui exposèrent chez lui : que Paul Rosenberg (1881-1959) fut sans
conteste l’un des grands marchands d’art de la première moitié du 20e siècle. Une figure sans laquelle l’art
de son temps ne serait pas ce qu’il est.
Après avoir repris la galerie de
leur père avec son frère aîné Léonce – qui deviendra à son tour marchand des
cubistes et dont la galerie L’Effort Moderne fera
également office de précurseur -, Rosenberg ouvre sa propre galerie en 1910 au
21 rue La Boétie. A cheval entre tradition et modernité, il expose aussi bien
ses artistes de prédilection que les maîtres français du 19e siècle. Il met ainsi en place une
double stratégie, esthétique et marchande, vendant les « classiques »
pour acheter et promouvoir les modernes, tout en inscrivant ceux-ci dans une
continuité avec le passé. Au-delà de la carrière de cet homme d’affaires avisé,
c’est aussi l’émergence de la figure du marchand d’art au 20e siècle qui se dessine à travers
l’exposition. Tout comme Paul Durand-Ruel, Ambroise Vollard ou Daniel-Henri
Kahnweiler, Paul Rosenberg a joué un rôle déterminant dans l’art de son époque,
et les archives rassemblées pour l’occasion aident à comprendre comment s’est
construit le marché de l’art aux prémices de la modernité. Ami et agent de
Picasso, Matisse, Braque, Léger, Marie Laurencin, il est le témoin emblématique
du déplacement géographique du centre de gravité artistique, de Paris à New
York, suite aux bouleversements de la Seconde Guerre mondiale. Une traversée de
l’Atlantique, aller simple.
http://www.tribunejuive.info/expositions/lhistoire-de-paul-rosenberg-grand-pere-danne-sinclair
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