La signature de Catherine
Deneuve sous une tribune polémique sur le climat post-Weinstein lui fait faire
le tour du monde. Revue de presse.
Catherine Deneuve a signé
"tout de suite". Juste le temps de lire le texte et de rappeler sa
copine Catherine Millet, et son nom était ajouté à celui des 99 autres femmes
signataires d'un texte publié mardi dans "le Monde" et qui s'alarme
du climat "puritain" qu'aurait déclenché l'affaire Weinstein. Des
milliers de femmes qui affirment, en France et dans le monde, qu'elles
n'accepteront plus en silence d'être harcelées ou agressées par des hommes,
quelle que soit leur rang social ? Un tournant "victimaire" du combat
féministe, qui s'apparente d'ailleurs à une "haine des hommes",
tancent les 100 femmes.
Ce point de vue, qui n'est
pas nouveau mais qui va à rebours des mouvements #Metoo et #Balancetonporc (et
du sens de l'histoire, diront des féministes), a fait bondir. Et la signature
de Catherine Deneuve, actrice de renommée internationale oscarisée et
césarisée, a largement permis à la tribune d'élargir les frontières du débat.
"Laissez-moi vous expliquer"
"Catherine Deneuve dit
que les hommes devraient 'avoir le droit d'importuner' les femmes", titre
en anglais l'Agence France-Presse dans une dépêche reprise à travers le monde,
notamment dans le "Guardian". "Catherine Deneuve et d'autres
dénoncent le mouvement #MeToo", titre aussi le "New York Times".
Catherine Deneuve à la
première de "Sage-femme", à la Berlinale, le 14 février 2017. (Gregor
Fischer / dpa / AFP)
Dans les colonnes du
"Guardian", l'auteure et dramaturge australienne Van Bandham, répond
directement à l'actrice. "Laissez-moi vous expliquer pourquoi #metoo n'a
rien d'une chasse aux sorcières", écrit-elle. Aux 100 signataires de la
tribune du "Monde" qui s'estiment "suffisamment clairvoyantes
pour ne pas confondre drague maladroite et agression sexuelle", Van
Bandham répond :
"Même celles d'entre
nous qui n'ont pas d'Oscar, qui ne feront jamais partie d'une clique
d''écrivaines, d'artistes et d'universitaires' ayant le privilège de blablater
dans 'le Monde' peuvent faire la différence. Les serveuses, les vendeuses, les
soldates, les scientifiques, les étudiantes (et n'importe qui d'autre) qui se sont
fait 'importuner', ont dit non, ont essayé de s'en aller, n'ont pas consenti,
ne voulaient clairement pas être là – et ont été ignorées."
"Avec leur
lettre", conclut l'auteure, "Deneuve et ses amies [...] se mettent du
côté de ceux qui trouvent des excuses pour s'en prendre à des femmes sans
pouvoir, pas du côté de ceux qui défendent leur liberté".
"Trahie et en
colère"
Dans "the
Independent", site d'info britannique, Holly Baxter ironise :
"En faisant le tour de
la presse internationale ces jours-ci, je m'aperçois qu'il existe un sujet relatif
aux droits humains qui nécessite notre attention de toute urgence : le droit
pour les hommes de draguer les femmes."
"Et ces autres droits
humains négligés ces derniers temps, qui sont tout aussi nobles et importants ?
Le droit de mettre votre main sur la cuisse de votre employée, par
exemple", demande la journaliste. "Alors lorsque j'ai entendu que
Catherine Deneuve et un groupe d'artistes et d'universitaires avaient écrit au
'Monde' pour dire que le droit des hommes à 'séduire' les femmes devrait être
protégé, j'ai été ravie."
"En tant que
féministe, en tant que millennial, en tant que française, je me sens trahie et
en colère", écrit dans le "New Statesman", un hebdo britannique,
la journaliste Pauline Bock. "Catherine Deneuve ne parle pas au nom de la
France ni au nom du féminisme français", écrit-elle, notant qu'en
associant le "féminisme" à une supposée "haine des hommes",
les signataires montrent bien qu'elles n'y comprennent rien.
Et de citer quelques-unes
des "nombreuses françaises géniales que le monde devrait regarder et
écouter", comme l'auteure Virginie Despentes, la réalisatrice Amandine Gay
ou la blogueuse Emma.
"Police du
puritanisme"
Moins ironiques, d'autres
titres ont choisi de se ranger derrière la tribune. Dans "Die Welt",
un journal conservateur allemand, on peut lire (la citation est du
"Courrier international") :
"Dans un pays dont la
culture et la littérature se caractérisent depuis des siècles par le
libertinage, la galanterie et la liberté sexuelle, et qui a produit des auteurs
comme le marquis de Sade ou le philosophe Michel Foucault, la police du
puritanisme – pour qui toute tentative de drague un peu lourde est assimilable
à un crime – ne pouvait pas œuvrer longtemps sans susciter de résistance.”
"Courrier
international" cite également une chroniqueuse québécoise du "Journal
de Montréal" persuadée que "jamais une telle lettre ne serait publiée
ici au Québec", et s'inquiète du fait que "l'on fasse sur la place
publique le procès d'hommes qui n'ont pas le droit de réplique ni de
présomption d'innocence".
https://www.nouvelobs.com/societe/20180110.OBS0445/puritanisme-post-weinstein-catherine-deneuve-ne-parle-pas-au-nom-de-la-france.html
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