Pour beaucoup, c'est
"L'Exposition" des Rencontres d'Arles, c'est L'Exposition de l'été,
voire de l'année. La rétrospective consacrée au travail des premières années
d'Annie Leibovitz, entre 1970 et 1983, dans la Grande Halle des Ateliers d’Arles,
est effectivement impressionnante, à la mesure du talent de la photographe,
mais souffre selon nous d'une scénographie mal adaptée.
8 000 clichés — acquis par
la fondation Luma —, 10 salles et plus de 1 000 m² d'exposition. Les chiffres
donnent le tournis, et il fallait sans doute bien cela pour couvrir les débuts
prolifiques de la jeune Annie Leibovitz.
DES ANNÉES FOLLES
La photographe ne s'était
jamais réellement replongée dans ses premiers clichés en tant professionnelle.
Peu le font. Le travail sur les archives n'est jamais simple, mais il est
essentiel pour comprendre. Ainsi, les photographies présentées par la fondation
Luma permettent de mieux appréhender la naissance et l'évolution d'Annie
Leibovitz lorsque, fraîchement sortie de l'école, elle est présentée au
rédacteur en chef du magazine Rolling Stone, qui publiera immédiatement
quelques clichés. Les montées en puissance à la fois du magazine et de la
photographe sont remarquables et probablement indissociables. Et le début des
années 1970 semble survolté. Annie enchaîne les reportages : les élections
présidentielles de 1972, le départ de Nixon en 1974, la tournée des Rolling
Stones en 1975... Elle n'arrête pas et a toujours son appareil photo en main.
Totalement impliquée dans ses reportages, elle ne fait pas "que"
suivre ses sujets : elle vit avec. En travaillant pour le magazine Rolling
Stone, Annie Leibovitz côtoie les stars de l'époque, fréquente la Factory de
Warhol, va aux concerts de Janis Joplin et suit les plus grandes stars ou les
étoiles montantes du cinéma hollywoodien. Pour tous les visiteurs nostalgiques
de ces années, c'est un véritable délice de (re)découvrir les stars de l'époque
dans des clichés rarement montrés.
Rencontres de la
photographie d'Arles 2017, Vue de l'exposition Annie Leibovitz : les premières
années 1970-1983. Photo La rédaction
Annie Leibovitz : les
premières années 1970-1983 / Arles 2017.
DANS LE STUDIO D'ANNIE
Le parcours de l'exposition
est strictement chronologique. La première salle présente les premiers clichés
de la photographe et l'on retrouve le panoramique réalisé par assemblage du
pont Neuf, à Paris, témoin de son voyage en Europe à la fin des années 1960.
Elle marche alors sur les pas d'Henri Cartier-Bresson, un photographe qu'elle
apprécie tout particulièrement.
L’exposition a été conçue
pour reconstituer le studio de la photographe, avec l’affichage des photos, des
planches contacts, sur des panneaux de liège, avec de simples punaises. L'idée,
si elle est plutôt intéressante, souffre de gigantisme. Dans les premières
salles, les murs sont presque recouverts de tirages de différentes tailles.
L'accumulation est impressionnante, mais également perturbante. On commence par
regarder les images une à une, mais l'on comprend très vite qu'à ce rythme,
c'est la journée qu'il faudra passer pour embrasser tout le travail de la
photographe ! Alors on glisse à la recherche les personnalités les plus
connues, mais là encore, c'est compliqué. Les stars sont bien répertoriées
grâce à des punaises rouges numérotées. Elles sont toutefois trop petites,
difficiles à discerner sur le mur, et les noms des personnalités listés en
blanc et en petit (encore) sont à peine lisibles. Le mur étant très haut, certaines
photos sont à difficiles à voir. Faut-il s'approcher pour observer les clichés
et découvrir l'image en détail, ou au contraire s'éloigner pour avoir une
vision panoramique de l'exposition ?
Le pire reste sans doute la
vitre de protection, épaisse et brillante, qui met une barrière entre les
visiteurs et les photographies. Pourquoi instituer un tel obstacle ? Il s'agit
ici de retirages et non d'originaux, et la valeur ne réside pas dans le
support, mais bien l'image.
DE ROLLING STONE À VANITY
FAIR
Ne boudons toutefois pas
trop notre plaisir ; dans ce bouillonnement photographique, Annie Leibovitz se
révèle peu à peu sous nos yeux. Son implication et sa recherche permanente de
la photo ou de l'instant "différent" se perçoivent assez rapidement.
L'un des exemples les plus frappants est sans doute le départ de Nixon en
hélicoptère, que seule Leibovitz prendra en photo. On découvre également
d'étonnants clichés de photographes de renom, comme Jacques Henri Lartigue ou
Helmut Newton, photographiés pour un portfolio sur les photographes qu'elle
admire.
Rencontres de la
photographie d'Arles 2017, Vue de l'exposition Annie Leibovitz : les premières
années 1970-1983. Photo La rédaction
Annie Leibovitz : les
premières années 1970-1983 / Arles 2017.
Vers la fin des années
1970, Annie Leibovitz semble s'assagir. À la fougue de la jeunesse semblent
succéder des images plus posées. Les salles se font moins remplies et l'on
respire un peu plus. L'œil a désormais le temps et la place de s'attacher au
détail. Annie troque de plus en plus souvent son 24x36 contre un moyen format
carré. Elle réalise alors l'une de ses photos les plus emblématiques, qui va
asseoir définitivement son talent : le portrait de John Lennon et Yoko Ono.
Dans la nuit qui suivit la
prise de vue, John Lennon fut tué dans la rue. Le portrait fait le tour du
monde et devient l'icône d'un hommage posthume planétaire.
L'exposition s'achève sur
l'année 1983, pendant laquelle Annie Leibovitz quitte le magazine Rolling Stone
pour Vanity Fair. Une page se tourne, une autre est sur le point de s'écrire.
Une histoire à suivre probablement dans le même lieu, dans quelques années.
Annie Leibovitz – The Early
Years: 1970-1983. Archive project #1 Jusqu'au 24 septembre 2017
https://www.focus-numerique.com/news/arles-2017-annie-leibovitz-les-premieres-annees-1970-1983-20503.html
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