Emmanuel Macron préside mercredi une cérémonie d'hommage à l'auteur de "Ceux de 14". Pour les descendants de l'ancien soldat de la Première Guerre mondiale, le transfert de ses cendres symbolise "le sacrifice de toutes les familles de France".
L'écrivain Maurice Genevoix, en 1979, un an avant sa mort. (ULF ANDERSEN / ULF
ANDERSEN)
Cela faisait plus de
dix ans que sa famille attendait cela. Quarante ans après sa mort, les cendres
de l'écrivain Maurice Genevoix seront transférées, mercredi 11 novembre, au
Panthéon. Emmanuel Macron rendra hommage à ce soldat de la Première Guerre
Mondiale lors d'une cérémonie réduite en raison du Covid-19, en présence de
quelques descendants de l'auteur de Ceux de 14.
"Sa présence
est toujours là"
À quelques
kilomètres à l'est d'Orléans, se tient la demeure de Maurice Genevoix, sur les
bords de la Loire. Une maison, entourée d'un grand parc, où Charlotte
Larere-Genevoix, la petite-fille de l'écrivain, a passé une partie de son
enfance et où elle vient encore régulièrement. Certaines pièces n'ont quasiment
pas changé. En particulier le bureau de son grand-père : "La plupart de
ces œuvres ont été écrites sur ce bureau. Il y a toujours ses stylo-plumes et
ses lunettes. Son ambiance de travail est toujours là, sa présence est toujours
là."
C'est dans cette maison qu'Emmanuel Macron a rendu visite, en janvier dernier, aux petits-enfants de Maurice Genevoix, pour parler de l'entrée au Panthéon de l'ancien poilu et grand témoin de la Première Guerre mondiale. L'écrivain sera blessé dans les tranchées, aux Éparges dans la Meuse en avril 1915. Une première cérémonie a d'ailleurs déjà eu lieu dans la commune, lundi, en présence de Charlotte Larere-Genevoix : "Tous ces militaires qui lui rendait hommage avec la cérémonie, les chants, la Marseillaise. Et l’entrée dans l’église des Éparges du cercueil de Maurice… Cette église dont il parle dans ses œuvres, j’en ai tremblé, j’en ai même pleuré je dois avouer."
"Il est sorti de la guerre blessé"
Maurice Genevoix avait écrit mais aussi parlé des tranchées et de sa
blessure. C'était à la radio,
en 1965 : "Dans une trouée, j’ai été aperçu par des tireurs de la ligne
d’assaut allemande. Un tireur m’a vu et m’a collé une balle dans un bras, c’est
extrêmement douloureux, c’est extrêmement sanglant. Je
suis tombé sur place, le tireur allemand qui me voyait a manœuvré sa culasse,
m’a collé une deuxième balle et m’a reflanqué une troisième balle qui,
celle-ci, m’a atteint à la poitrine."
Près de son ancienne résidence dans le Loiret, un espace dédié à l'auteur de Ceux de 14 a vu le jour grâce à Jean-Louis Gonin, ancien professeur de français, fin connaisseur de l'œuvre de Maurice Genevoix : "Il est sorti de la guerre blessé, invalide. Il y a une citation sur le mur qui dit : ’Ce que nous avons fait en vérité, c’est plus que ce que l’on pouvait réclamer à des hommes, et nous l’avons fait’. Pour moi, ça résume bien la gravité de ce vécu."
Une œuvre un temps
censurée
Si ce récit de 14-18 lui ouvre aujourd'hui les portes du Panthéon, il fut un temps où la République française ne voulait pas lire Maurice Genevoix. Christian Chenault, ethnologue, retraité, lui aussi voisin de la maison Maurice Genevoix - est passionné par ses livres. Il prend l’édition original de Sous Verdun, tourne les pages et montre les inscriptions : "Supprimé par la censure". En fait ce qui était censuré en 1916, ce sont toutes les exactions de l’armée française. L'écrivain parlait en toute franchise de ce que faisait les soldats - et ils ne se privaient pas de piller les maisons par où ils passaient parce qu’ils avaient faim et soif - et cette dimension a disparu alors qu'elle était présente dans le texte original. Quelques années après la fin de la Première Guerre mondiale, Maurice Genevoix avait finalement pu réintégrer les passages censurés dans son livre.
Un siècle après la grande guerre, pourquoi Emmanuel Macron choisit-il de panthéoniser
Maurice Genevoix ? Pour Julien Larere-Genevoix, son petit-fils, l'écrivain
soldat représente de très nombreux poilus : "L’idée de la panthéonisation
de Maurice Genevoix, elle était dans notre esprit, et c’était une évidence,
uniquement liée au centenaire de la Grande Guerre. C’est de rappeler le
sacrifice de toutes les familles de France".
Ce n’est pas une
démarche égoïste, c’est rappeler l’horreur de ce conflit, c’est ça que l'on a
voulu mettre au centre. Maurice Genevoix entre au Panthéon comme témoin.
Julien Larere-Genevoix
à franceinfo
"Nous n’avons jamais dit 'Maurice Genevoix est l’archétype du soldat de 14 ou le héros de 14'. On n’a jamais dit non plus que Maurice Genevoix était le soldat inconnu. Maurice Génevoix est le témoin", conclut son petit-fils.
Pour les descendants
de Maurice Genevoix, décédé en 1980, le transfert des cendres de l'ancien poilu
est l'aboutissement d'un projet pensé il y a plus de dix ans. Son entrée au
Panthéon avait été proposée sous le quinquennat précèdent mais François
Hollande lui avait préféré quatre figure de la Résistance. C'est
donc la sensibilité d'Emmanuel Macron pour Maurice Genevoix qui permet mercredi
soir sa panthéonisation.
https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-choix-franceinfo/ceremonies-du-11-novembre-sur-les-traces-de-l-ecrivain-maurice-genevois-temoin-des-tranchees-qui-entre-au-pantheon_4158753.html
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