Si les Argentins ont certes
vécu une entrée en matière difficile dans le Mondial russe, ils n'en restent
pas moins un véritable danger pour les Bleus.
Par Paul Guyonnet
AGUSTIN MARCARIAN / REUTERS
France-Argentine à la Coupe
du monde: Pourquoi il ne faut surtout pas prendre l'Albiceleste à la légère.
FOOTBALL - Cette fois, les
Bleus vont se retrouver dans le grand bain. Après un premier tour relativement
paisible et conclu -sans la manière- avec un nul insipide contre le Danemark et
deux victoires laborieuses face au Pérou et à l'Australie, l'équipe de France
de football se prépare désormais à affronter l'Argentine, samedi 30 juin à
Kazan, en huitième de finale de la Coupe du monde 2018.
Une confrontation à risque
pour les hommes de Didier Deschamps, face à une équipe qui s'est extirpée
miraculeusement de la phase de poule. En effet, sans un but aussi splendide
qu'inattendu à la 86e minute de son troisième et dernier match du groupe D,
l'Albiceleste aurait pris la porte de la compétition dès le premier tour, après
notamment une déroute mémorable face à la Croatie (0-3).
Et pourtant, les Bleus
seraient bien mal avisés de prendre de haut l'Argentine, sa riche histoire, son
passé victorieux et son effectif plein de ressources. La preuve...
Historiquement, l'Argentine prévaut
Cela faisait quarante ans
et le Mundial 1978 qu'il n'y avait plus eu de France-Argentine en Coupe du
monde. À l'époque, les Argentins qui évoluaient à domicile avaient écarté les
Bleus (2-1) avant de poursuivre leur campagne jusqu'au titre suprême, le
premier de leur histoire. À la suite de cette opposition, les Français avaient,
eux, pris la porte du tournoi dès leur second match de la phase de poules.
La seule autre rencontre
entre les deux pays dans la plus prestigieuse des compétitions de football,
lors de la toute première édition de la Coupe du monde, en 1930, ne laisse
guère de meilleurs souvenirs à l'équipe de France. Pour le premier match de
l'histoire des Bleus dans un Mondial, les Argentins s'étaient imposés (1-0),
éliminant les Français pour filer quelques matches plus tard jusqu'en finale.
Et oui, après chaque France-Argentine en Coupe du monde, les Français ont été
sortis et l'Albiceleste a terminé en finale du Mondial, rien que ça.
Plus récemment que ces
antiques confrontations en compétition officielle, les derniers affrontements
amicaux entre Français et Argentins donnent une bonne idée du péril encouru par
les hommes de Didier Deschamps. En 2007, tout d'abord, sur la pelouse du Stade
de France, les tricolores avaient été vaincus (0-1) par un adversaire peu
spectaculaire mais capable de confisquer le ballon jusqu'à ce qu'un éclair ne
déchire la nuit. En l'occurrence, c'est l'ancien Monégasque Javier Saviola qui
avait profité de l'une des très rares offensives du match pour scorer dans le
premier quart d'heure, avant que les siens ne préservent le score.
En 2009, dernier match en
date entre les deux nations, la leçon avait été encore plus magistrale. Sur la
pelouse du Stade Vélodrome, à Marseille, les Argentins alors entraînés par un
certain Diego Maradona avaient fait la démonstration de ce qu'est le réalisme
en football. Dans un match terne et encore une fois contrôlé défensivement par
les Sud-Américains, deux temps forts avaient suffi à l'Argentine pour
l'emporter, sur une frappe de Jonás Gutiérrez puis une percée fulgurante de
Lionel Messi. En clair, si l'on se réfère au passé plus ou moins récent, les
Français devront être sur leurs gardes et déjouer l'Histoire.
Une équipe toujours au rendez-vous
Et il n'y a pas que la
grande Histoire qui doit faire peur aux Bleus, car sur les dernières années
aussi, les Argentins accomplissent des prouesses. Alors certes, ils n'ont plus
remporté de trophée mondial ou continental depuis 1993, mais ce n'est pas pour
autant que le football argentin est sur le déclin. En effet, l'Albiceleste
reste sur trois finales au cours des trois dernières compétitions majeures
qu'elle a disputées.
Elle était notamment de la
dernière finale de Coupe du monde, en 2014 au Brésil, un match perdu en
prolongations face à une redoutable équipe d'Allemagne. Après un premier tour
maîtrisé, les Argentins avaient réussi à se hisser jusqu'au dernier match de la
compétition à la hargne, en remportant des victoires étriquées. 1-0 en
prolongations contre la Suisse en huitième, le même score en quart face à une
Belgique pourtant extrêmement bien pourvue, un succès aux tirs-au-but contre
les Pays-Bas en demi-finale après un match nul et vierge. Bref, un parcours de
bagarreurs, de costauds, mus par une défense infranchissable.
Une habitude de la victoire
cultivée également sur la scène continentale, où la sélection au maillot bleu
et blanc fait figure de poids lourd incontournable. Sur les cinq dernières
éditions de la Copa América, l'équivalent sud-américain de l'Euro, l'Argentine
s'est retrouvée quatre fois en finale, en particulier lors des deux dernières
éditions, en 2015 et en 2016. Les deux fois, au bout, une défaite rageante aux
tirs-au-but après un nul sans but contre le Chili. Pas de trophée donc, mais
une présence régulière au plus haut niveau, qui confirme que le 30 juin à
Kazan, les Bleus feront face à un adversaire parfois dans le doute, mais à la
régularité remarquable.
Un potentiel offensif inégalé
Mais trêve de regards en
arrière. Car ce ne sont pas les sélections du passé que les Bleus retrouveront
sur la pelouse russe, mais bien le onze que composera Jorge Sampaoli... et même
un peu plus que ça. Car oui, la sélection argentine a connu un début de Mondial
difficile, mais elle dispose toutefois d'un réservoir de talents
impressionnant, dont certains sur le banc de touche et qui ne demandent qu'à
pouvoir s'exprimer.
Avec une ligne d'attaque
potentiellement composée de l'un des meilleurs joueurs de tous les temps,
Lionel Messi, et de trois des attaquants les plus létaux du football mondial
(Paulo Dybala, Gonzalo Higuain et Sergio 'Kun' Agüreo), le potentiel offensif
de l'Albiceleste est peut-être le plus terrifiant de la compétition. Et il y a
fort à parier que de tels joueurs se transcendent lors du match à élimination
direct qui se profile contre les Bleus, certains probablement en entrant en jeu
pour donner un second souffle à leur équipe.
Privé de temps de jeu
depuis le début de la compétition, Paulo Dybala est un tireur de coups-francs
absolument génial à qui une occasion infime pourrait permettre de faire la
différence. Gonzalo Higuain, né en France et qui aurait pu porter la tunique
frappé du coq s'il l'avait souhaité, a lui maintes fois fait montre de sa
capacité à faire la différence dans les instants clés avec son club de la
Juventus Turin. Quant à Agüero et Messi, leurs statistiques au plus haut niveau
sont éloquentes. Et on peut même parier qu'un possible quart de finale face au
Portugal de son rival éternel Cristiano Ronaldo motivera encore un peu plus
"la Pulga". Les Bleus sont prévenus: il ne faudra pas laisser le
moindre espace aux Argentins.
Un premier tour autrement relevé
C'est une rengaine qui ne
cesse de revenir depuis que la perspective d'une opposition entre les deux pays
a commencé à se dessiner: l'Argentine a subi une lourde défaite contre la
Croatie quand les Bleus commençaient par deux victoires, la tendre défense
sud-américaine semble à la portée des flèches tricolores, et les Bleus, sur la
lancée de leur premier tour, seraient favoris de la confrontation.
Mais attention aux
raccourcis tout de même. Car si la France est sortie invaincue du groupe C, les
Argentins faisaient, eux, face à une poule D bien plus relevée. Quand la France
jouait un Pérou absent de la Coupe du monde depuis 36 ans, une Australie sans
aucun fait d'armes sur la scène mondiale et un Danemark bien heureux d'assurer
une place en huitièmes de finale, l'Albiceleste se coltinait des poids lourds.
Lors de leur défaite, les
Argentins n'ont effectivement pu que constater que la Croatie est désormais une
place forte du football mondial, avec des éléments habitués des joutes
d'exception en club: Madzukic avec la Juventus, Modric qui a gagné quatre
Ligues des Champions au Real, Rakitic qui est un cadre au Barça, Lovren tout
juste finaliste de la C1 avec Liverpool, et les virevoltants Perisic, Rebic ou
Kovacic devant, pour ne citer qu'eux.
Et les deux autres
participants étaient loin d'être des hommes de paille, avec une Islande qui
restait sur un quart de finale surprenant à l'Euro 2016 après avoir fait chuter
l'Angleterre au tour précédent, et un Nigeria toujours aussi solide et
parfaitement organisé sous la direction de son sélectionneur Gernot Rohr, bien
connu de la Ligue 1. Alors oui, l'Argentine a concédé une défaite quand la
France s'imposait lors de la seconde journée de la phase de poules, mais
l'adversité à laquelle elle a dû faire face était autrement plus redoutable.
Reste maintenant à savoir
si les nombreux observateurs qui assurent que les Bleus l'emporteront face aux
Argentins auront raison. Quoi qu'il en soit, ce France-Argentine sera l'un des
très beaux rendez-vous de ce début de Mondial, et l'équipe qui sortira
victorieuse du duel pourra se targuer d'avoir accompli un exploit considérable.
https://www.huffingtonpost.fr/2018/06/26/france-argentine-a-la-coupe-du-monde-pourquoi-il-ne-faut-surtout-pas-prendre-lalbiceleste-a-la-legere_a_23468790/?utm_hp_ref=fr-homepage
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