Par Nicolas d'Estienne
d'Orves
Juan Diego Florez, Natalie
Dessay et Laurent Naouri au Théâtre des Champs-Élysées. Puis Sabine Devieilhe à
la Philharmonie de Paris: quatre voix pour trois récitals, réjouissons-nous!
Cette semaine, la voix est
à l'honneur. Les voix, devrait-on dire, car trois concerts célèbrent les
ensorcellements de l'art vocal.
Apparu comme un météore à
l'âge de 23 ans, Juan-Diego Flores est parvenu à conserver le titre très
jalousé de champion du ténor belcantiste. Rien n'est plus fragile que cette
technique qui exige autant de nuances que de vaillance, pour défendre le
répertoire italien du premier XIXe siècle. Rossini, Bellini, Donizetti ont
trouvé en la personne de ce chanteur péruvien leur interprète le plus éclatant,
et son public ne s'y est pas trompé qui le fête depuis plus de vingt ans. Le
plus difficile est alors de durer, et Florez y est parvenu, conservant une voix
de soleil et de miel malgré le passage des ans. Ce n'est toutefois pas son
répertoire de prédilection qu'il propose au public du Théâtre des Champs-Élysées,
mais des incartades antérieures (Don Giovanni, La Flûte, Cosi, Mitridate,
L'Enlèvement) et postérieures (Offenbach, Verdi et Puccini). Mais Juan Diego
Florez est bien trop maître de son art pour prendre des risques inconsidérés et
l'on se réjouit de découvrir ces chemins de traverses.
Toujours au Théâtre des
Champs-Élysées, Natalie Dessay s'amuse à joyeusement casser son image de
chanteuse lyrique, non sans une application bien réjouissante. Le récital «en
famille» qu'elle propose avec son époux, le baryton Laurent Naouri, au TCE,
fera le grand écart entre les répertoires pour célébrer cet art bien en soi
qu'on nomme «la chanson». Sous-titré «La bonne chanson, de Baudelaire à
Gainsbourg», le programme entend jongler entre les genres, pour mieux les
décloisonner. Si Schubert et Bizet passent par ici, on croisera aussi Ferré et
Brassens. L'accompagnement du trio de jazzmen rassemblé autour du pianiste
Guillaume de Chassy parachèvera ce gourmand «cross over».
À la Philarmonie, le timbre
exquis et la technique saisissante de Sabine Devieilhe feront merveille dans le
périlleux répertoire français de la fin du XIXe.
À l'inverse de Florez, le
récital proposé à la Philharmonie de Paris par la soprano colorature Sabine
Devieilhe est en parfaite adéquation avec sa tessiture. Son timbre exquis et sa
technique saisissante font merveille dans ce périlleux répertoire français de
la fin du XIXe siècle. La (redoutable) mort d'Ophélie dans le Hamlet d'Ambroise
Thomas ou le (fameux) «air des clochettes» dans Lakmé de Delibes sont des
morceaux de bravoure qu'elle est parmi les seules à savoir aujourd'hui
défendre. L'ensemble du concert devrait enchanter les passionnés de musique
française, car François-Xavier Roth a déniché de vraies raretés: un extrait de
Madame Chrysanthème de Messager ou l'ouverture de La Princesse jaune de
Saint-Saëns…
http://www.lefigaro.fr/musique/2017/11/11/03006-20171111ARTFIG00008-dessay-naouri-florez-devieilhe-quatre-voix-pour-trois-recitals-parisiens.php
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