Martina
Serafin est une Tosca digne. Sa voix, admirablement maîtrisée, déploie de
riches couleurs. –
Photo Charles Duprat/Opéra national de Paris
Tosca (De Giacomo Puccini.Direction de Daniel Oren. Mise en scène
de Pierre Audi. A l'Opéra Bastille (operadeparis.fr), jusqu'au
28 novembre. 3 heures.)
Elle se devine à peine au premier acte de l'opéra de Puccini. Une
haute structure de bois peinte en noir permet de représenter l'intérieur de
l'église Sant'Andrea della Valle à Rome, d'installer d'un côté Mario
Cavaradossi en train de peindre, de l'autre Cesare Angelotti, prisonnier
politique en fuite venu s'y réfugier. Puis aux deuxième et troisième actes,
l'immense croix plane sur le plateau de l'Opéra Bastille, inquiétante et
inquisitrice. Elle symbolise l'éternelle alliance du sabre et du goupillon qui
maintient sous sa coupe cette Italie du début du XIXe siècle.
Le redoutable baron Scarpia, chef de la police, fait régner la terreur sous
prétexte de morale, mais il ne peut contenir son attirance pour la cantatrice
Floria Tosca. Elle sera forcée de céder à ses avances pour obtenir la
libération de Mario, qu'elle aime. C'est aussi le martyre de Tosca que représente
cette croix.
A défaut d'être saisissante ou originale, la mise en scène de Pierre
Audi a le mérite de rester lisible, fidèle au livret de Giuseppe Giacosa et
Luigi Illica - et de ne jamais contrarier le récit. L'arrivée de l'évêque et de
sa suite couverts de dorures et de bijoux comme échappés de « Fellini
Roma » ne s'imposait sans doute pas et il aurait sans doute mieux valu
resserrer la direction d'acteur lors du jeu du chat et de la souris entre
Scarpia et Tosca. Cela dit, qui découvre cet opéra en comprendra les enjeux et
l'intensité dramatique d'autant plus que la partition est plutôt bien servie.
La passion de Daniel Oren
Fin connaisseur du répertoire lyrique italien, Daniel Oren dirige avec
la passion nécessaire cette tragique histoire d'amour, mais il évite les
sentiments faciles et obtient de subtiles nuances d'un orchestre de l'Opéra
national de Paris des grands jours. Familière du rôle qu'elle a déjà incarné
sur cette même scène dans la précédente mise en scène de Werner Schroeter, la
soprano autrichienne Martina Serafin est une Tosca digne. Elle ne brûle pas les
planches, mais sa voix, admirablement maîtrisée, déploie de riches couleurs.
Piètre acteur, mais voix de soleil, Marcelo Alvarez convainc par la
plénitude de son timbre, la justesse de son émission et l'intelligence de son
chant (en témoigne le merveilleux « Recondita armonia » au premier
acte). Mais on retiendra surtout le Scarpia retors de Ludovic Tézier, qui, sans
jamais grimacer, impressionne et terrifie. Annoncé souffrant en début de
spectacle, il a fait pourtant montre d'une aisance vocale à faire bien des
jaloux.
www.lesechos.fr/week-end/culture/0203851376949-tosca-la-crucifiee-a-lopera-de-paris-1052814.php?AqJWTG9WtT0YJrFX.99
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