"Nous avons des raisons de redouter une très grande
violence".
Le HuffPost avec AFP
POLITIQUE - La menace est prise au sérieux au plus haut sommet de
l'État. "Nous avons des raisons de redouter une très grande
violence", a fait savoir l'Elysée à l'AFP, alors que se multiplient les
appels à une nouvelle mobilisation des gilets jaunes partout en France.
L'exécutif s'évertue encore jeudi à convaincre qu'il a entendu et
compris la "colère insaisissable et incontrôlable" des manifestants,
à deux jours d'une nouvelle mobilisation qui fait craindre une explosion de
violence.
Les remontées du terrain sont "extrêmement inquiétantes"
avec le resserrement du mouvement sur "un noyau dur de plusieurs milliers
de personnes" qui viendraient à Paris "pour casser et pour
tuer", a expliqué l'Élysée à Franceinfo.
"Un appel clair et explicite au calme"
Des dizaines d'appels à manifester samedi à Paris se concurrencent
sur les réseaux sociaux, donnant pour la plupart rendez-vous sur les
Champs-Elysées, qui a été le théâtre de scènes d'émeutes le 1er décembre. Ce
jeudi 6 décembre, le premier ministre Edouard Philippe poursuit au Sénat un
débat engagé mercredi à l'Assemblée pour défendre les mesures prises en
urgence: outre l'annulation pour l'heure de la taxe carbone, il s'agit d'un gel
des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver, et du renoncement à durcir le
contrôle technique automobile avant l'été.
Édouard Philippe a également jugé "nécessaire" un débat
sur la réforme de l'Impôt sur la fortune (ISF) - que le président Emmanuel
Macron exclut de remettre en place. Toutes ces annonces répondent à des demandes
des gilets jaunes. Mais pour près de huit Français sur dix (78%), les annonces
du gouvernement ne répondent pas aux attentes exprimées, selon un sondage Elabe
diffusé mercredi, alors qu'il n'était question que d'un moratoire de six mois.
Le chef du gouvernement n'a pu que reconnaître mercredi que la "colère est
demeurée insaisissable et incontrôlable".
Le président Emmanuel Macron, cible de toutes les critiques sur les
points de blocage, a demandé de son côté solennellement aux partis politiques,
aux syndicats et au patronat "de lancer un appel clair et explicite au
calme".
"Ce qui est en jeu, c'est la sécurité des Français et nos
institutions", a relayé devant les députés Edouard Philippe: "Tous
les acteurs du débat public, responsables politiques, responsables syndicaux,
éditorialistes et citoyens, seront comptables de leurs déclarations dans les
jours qui viennent."
Une vraie radicalisation
L'exécutif redoute avant tout une nouvelle explosion de violences
ce week-end, et une extension de la colère à d'autres secteurs, au moment où la
FNSEA annonce que les agriculteurs vont eux aussi se mobiliser. Les fédérations
CGT et FO du secteur du transport routier ont appelé pour leur part à la grève
à partir de dimanche soir pour une durée indéterminée. La situation est
également tendue dans les lycées. Partout en France, les appels à se mobiliser
une nouvelle fois samedi se multiplient et le ministère de l'Intérieur fait
état d'une "mobilisation de la part de l'ultradroite et de
l'ultragauche".
De même source, "on constate une vraie radicalisation de
certains +gilets jaunes+, comme on a pu le voir dans les comparutions
immédiates depuis lundi mais aussi dans leurs propos. Ils se radicalisent par
la violence et politiquement." Sur les réseaux sociaux, les mots d'ordre
évoquent un renversement des institutions: "dissolution de l'Assemblée
nationale", "Manu, on arrive !", "Pot de départ de Macron
!", ou encore "Tous à la Bastille".
Même tonalité auprès de gilets jaunes interrogés par l'AFP mercredi
sur un rond-point à Augny (Moselle), près de Metz. "J'ai 700€ de
retraite... on veut vivre, les gens veulent vivre de leur travail", a
témoigné Joël, 66 ans, un retraité du bâtiment, qui n'avait plus manifesté
depuis mai 1968: "Macron, il a donné un coup de pied dans la fourmilière,
les gens ont cru qu'il allait changer les choses et améliorer leur pouvoir
d'achat, et c'est l'inverse qui s'est passé".
Pour Sylvain, 63 ans, militaire retraité, le président "nous
prend pour des pigeons, des imbéciles. S'il faut aller le chercher à l'Elysée,
on ira. Tant qu'il sera là, ça ne changera pas. C'est un imposteur, un menteur,
il nous méprise". A Dole, Fabrice Schlegel, un promoteur immobilier de 45
ans qui est l'un des premiers leaders des "gilets jaunes" dans sa ville,
s'est montré visiblement de plus en plus inquiet de la tournure des choses.
"Je ne sens pas les choses très bien, il y a une émulation
révolutionnaire, mais comment les Français lambda vont-ils réagir face à cela
?", a-t-il répondu à l'AFP: Je suis très inquiet, on a des revendications
gauchistes, on ne pense plus à celui qui n'a pas assez, on pense à celui qui a
trop. Quand je vois que sur des barrages quand une grosse voiture arrive,
certains veulent l'arrêter et la cibler plus particulièrement...".
A quoi s'attend-il ce week-end ? "Beaucoup plus de gens
montent à Paris que les dernières semaines. Et imaginez l'état d'esprit : ils
ont vu les images des week-ends précédents et ils veulent monter à Paris. Ce
n'est pas pour faire du tourisme !"
Mercredi, quelques milliers de "gilets jaunes" ont
poursuivi leurs actions, en ciblant des dépôts pétroliers, routes et zones
commerciales, mais un retour à la normale dans les stations-service en pénurie
de carburants est prévu dans les 48 heures.
Sur le réseau autoroutier, les manifestations entraînaient toujours
de "fortes perturbations localement", selon Vinci. L'opérateur a fait
état de plusieurs manifestations et barrages, notamment sur l'A9 dans
l'Hérault, au niveau des péages de Frontignan, Saint-Jean-de-Védas ou Lunel, sur
l'A54 dans le Gard, sur l'A50 aux péages de la Ciotat (Bouches-du-Rhône) ou
Bandol (Var).
https://www.huffingtonpost.fr/2018/12/05/gilets-jaunes-lelysee-craint-une-tres-grande-violence-samedi_a_23610123/?utm_hp_ref=fr-homepage
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